Ce Coronavirus permet, si je peux le dire ainsi, de questionner et de mettre dans une autre perspective tout plein d’aspects de nos vies. Avant de partir dans le vif du sujet, il convient de préciser que ce qui va être dit là e concerne pas tout le monde. Je pense notamment aux indépendants qui ont d’autres préoccupations que celle-ci, comme par exemple de savoir comment ils vont payer leur loyer le mois prochain.

Ce coronavirus me rappelle quand j’étais au chômage et qu’on me disait « C’est cool, c’est des vacances ». Ce à quoi je répondais « Pas vraiment, les vacances sont des vacances car c’est un repos qui a une fin, qui est intégré dans une continuité. Le chômage reste une situation précaire où tant que tu n’as pas de travail, rien ne te permet de croire que tu en auras un un jour. En bref, ta continuité à toi, c’est de ne pas avoir de job et de postuler, tout en sachant que plus le temps passe, plus la reprise sera difficile. C’est compliqué de se détendre dans ces conditions. Ce n’est donc pas vraiment des vacances »

Donc l’angoisse du chômage, comme celle qui peut être liée au Coronavirus viennent du fait que c’est un début dont la fin est incertaine. Quelque chose a été ouvert.. mais quand va t’il se refermer ? Et comment ?

Notre vie est ponctuée de début, de fin, d’échéances, d’avant et après, de routines. Mais en ce moment, il y a tout un tas d’échéance où… rien.. on ne sait pas. Le travail, c’est tout de même un tas d’échéances qui nous mobilisent une quarantaines d’heures par semaines. On a peut-être choisi un travail, on n’a pas choisi de travailler. De plus, toutes ces échéances nous viennent de l’extérieur, ce qui a un côté reposant car cela nous allège d’une partie de notre responsabilité vis-à-vis de nous même. 8h par jours, on ne fait pas vraiment ce qu’on veut.

Les repas sont des échéances, le jour et la nuit sont des échéances, la dernière fois qu’on a vu telle ou telle personne est aussi une échéance. Il y a les échéances de long terme et celles de court terme. Elles ont ce petit côté rassurant car telle des lianes, on s’agrippe de l’une à l’autre dans l’espoir d’avancer. Autrement, peut-être qu’on tomberait. Ces points d’attache sont sécurisants.

Parler d’un après-coronavirus, quand les choses « seront revenues à la normale » c’est se mettre une sécurité, une échéance dans le temps, rendant le phénomène moins anxiogène. Comment parler de normalité après un tel traumatisme ? Que veut dire « normal » ? Il y a tout l’aspect social où l’on ne sait pas comment ça va être de retoucher des gens, de boire dans la bière de son pote ou d’embrasser la première venue (conquise.. ça fait plus valeureux). Mais il y a aussi la sphère psychologique et émotionnelle. Le bruit extérieur avait au moins cette vertu (si je peux dire ainsi) de se fondre dans le bruit intérieur, le rendant plus diffus. Mais quand le dehors se calme, le bruit intérieur alors se mets à faire beaucoup de remous. Et dans le pire des cas, quand on est plus proche des médias anxiogènes que des forêts apaisantes, le bruit pourrait devenir vacarme infernal. Comment nous gérons tout ça? Au moment où ça émerge. Pas après..

Au final, les échéances sont à double tranchant. Elles sont essentielles car structurantes mais peuvent devenir enfermantes. Lesquelles choisir ? Auxquelles se fier ? Aujourd’hui, beaucoup de nos échéances ont volées en éclat. Dans un premier temps on respire, mais il va falloir poser d’autres échéances, ne serait-ce que pour se sécuriser.

Est-il possible d’envisager chaque minute comme une échéance ?